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2022, les inquiétudes des constructeurs de maisons individuelles

constructeurs de maisons individuelles

La maison individuelle reste l’habitat préféré des Français : 80 % des sondés préfèreraient vivre en maison individuelle (selon une enquête IFOP de janvier 2022). Et ce n’est pas le confinement et l’avènement du télétravail qui risquent d’inverser la tendance. La majorité d’entre nous rêve de vivre dans une maison, avec un jardin de préférence. Mais si le secteur est actif, les constructeurs de maisons individuelles sont inquiets.

Les acquéreurs sont en quête de tranquillité, voire de nature. Pour preuve, 2021 a été une année exceptionnelle pour le secteur : 139 600 ventes brutes ont été recensées en secteur diffus, le meilleur résultat depuis une dizaine d’années. En comparaison, en 2019, avant les effets de la crise du Covid-19, on comptait 125 400 ventes, et en 2022, le demandes de permis de construire ont bondi de 23 % pour atteindre 141 900 au premier trimestre, un record depuis quinze ans !

Tout semble donc aller bien mieux dans le meilleur des mondes… mais à bien y regarder, ce n’est pas si simple : la situation plus complexe qu’il n’y paraît et les constructeurs sont inquiets. La raréfaction des terrains, la hausse du prix des matériaux et les problèmes d’approvisionnement dus à différentes crises, mais aussi l’application de la Réglementation environnementale (RE 2020) fragilisent le secteur de la construction de maisons individuelles.

Des terrains de plus en plus rares

Ce n’est pas Emmanuelle Wargon, la ministre du Logement sortante, qui a rassuré la profession, assurant, avant de revenir sur ses dires, que « le modèle du pavillon avec jardin n’est plus soutenable » en France. Des propos qui vont donc à l’encontre des rêves des Français et anticipaient certainement la loi sur l’artificialisation des sols, dont l’objectif est de diviser par deux le nombre de terrains naturels, agricoles ou forestiers exploités notamment pour la construction de logements d’ici 2030.

constructeurs de maisons individuelles

Or, les terrains disponibles sont déjà de plus en plus rares et donc de plus en plus chers, et sans terrain à bâtir, pas de maison neuve. Les constructeurs de maisons individuelles vivent une situation inédite et particulièrement inquiétante, car les problèmes s’accumulent.

La RE 2020, autre facteur d’augmentation des prix

RE 2020

Sans envisager la poursuite du « quoi qu’il en coûte », Xavier Chain, responsable des Maisons Clairval et des Maisons Belles Demeures, souligne « que les constructeurs sont les bons élèves du secteur« : une maison ancienne, même bien rénovée, n’atteindra jamais la performance d’une maison neuve pour un coût plus élevé. Ils sont sensibilisés aux préoccupations écologiques et conscients de leur rôle dans ce domaine.

« L’application de la RE 2020 et l’amélioration des performances énergétiques des logement sont une bonne chose. Mais il est bon de rappeler que pour être plus économe en énergie et plus respectueuse de l’environnement, la norme énergétique fait grimper le prix de 8 à 13 % selon le type de maison ».

Xavier Chain

Pénuries et hausses des prix des matériaux

Autre difficulté rencontrée par les constructeurs de maisons individuelles : la pénurie de matières premières, associée à une augmentation du prix des matériaux sans précédent.

« Les marges fondent comme neige au soleil et nous ne pourrons pas tenir bien longtemps », me disait Xavier Chain.

La guerre en Ukraine a indiscutablement aggravé une situation déjà incertaine : les prix du métal, du zinc, du bois ont augmenté de manière significative. Cela dit, avant cela, les restrictions sanitaires ont provoqué une flambée des prix et de grandes difficultés d’approvisionnement.

constructeurs de maisons individuelles

La reprise de la production de matériaux est lente et les constructeurs dépendent en grande partie des pays asiatiques : les délais se sont allongés, les demandes étant conséquentes, en entraînant des hausses de prix vertigineuses, qui vont jusqu’à 40 % pour certains bois ou panneaux isolants, 43 % pour l’acier et 30 % pour les tuiles, par exemple. Pratiquement toutes les matières premières ou matériaux (fer, PVC, aluminium, cuivre, briques, etc…) sont impactées. Les marchés sont bousculés.

« Pour l’acier, indispensable dans le bâtiment, (armatures, grillages, béton armé), les commandes ont repris après avoir été stoppées, souligne Xavier Chain, mais nous n’avons plus aucune visibilité : ni délais, ni prix, et aucune solution alternative car les fournisseurs principaux, la Turquie ou l’Italie, s’approvisionnent en Ukraine. »

Les marges des constructeurs de maisons individuelles réduites

Conséquence de la désorganisation du marché, les commandes de matériaux passées en octobre 2021 sont facturées 8, 10 ou 30 % plus cher en 2022. Cette hausse des prix concerne non seulement la tuile ou la brique, des matériaux indispensables pour construire une maison, mais aussi des matériaux plus rares mais aussi plus chers. Cela crée des coûts supplémentaires qui réduisent les marges des constructeurs. Sans compter, par ailleurs, qu’en en raison des délais d’approvisionnement, de nombreux chantiers sont retardés.

«  Nous attendons une nouvelle hausse à la rentrée, explique Xavier Chain. Se projeter est impossible. Dès lors, comment expliquer aux acquéreurs l’augmentation du prix entre la signature du contrat et le démarrage des travaux ou la pose de la charpente? Comment répercuter les hausses alors qu’ils ont signé un contrat de construction CCMI à prix ferme et définitif avec en plus des pénalités de retard ? »

constructeurs de maisons individuelles

L’inquiétude est croissante… La question est de savoir si ces hausses vont perdurer et seront définitives. A ce stade, il est compliqué pour les constructeurs d’appliquer une clause d’indexation. Augmenter les prix des maisons neuves risque de réduire le nombre des acquéreurs, et en particulier aux jeunes couples primo-accédants, qui constituent une grosse partie des candidats à l’achat d’une maison neuve.

Le nouveau gouvernement va devoir urgemment s’atteler à la tâche pour juguler l’inflation (4,7% dans le bâtiment pour le dernier trimestre) de façon à ce que cette crise ne devienne pas structurelle. Le secteur est déjà durement touché.

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